à coeur serré. (spurs)

il paraît que dans la vie, rien n'arrive vraiment par hasard. alors que tu as reçu un message de ta soeur t'indiquant qu'elle se trouvait à l'entrée du bâtiment dans lequel tu avais pris tes quartiers avec ta colocation, tu as forcément décidé de quitter le lycée en plein milieu de la journée. c'est pas important la chimie de toute manière. tu penses en faisant trembler ta jambe contre le siège sur lequel tu t'es installé. tu regardes droit devant. elle était en voyage, ta soeur. amoureuse, également. alors pourquoi elle serait déjà de retour ? ça a foiré, c'était un connard de toute manière. non, elle te l'aurait dit, non ? tu soupires, tu joues avec le câble de tes écouteurs. le chemin te paraît insoutenable, presque trop long. et puis, quand enfin on annonce ton arrêt, tu bouscules un jeune avant de quitter le bus. sur le trottoir d'en face, tu la vois tout de suite, trop vite, trop facilement. sa frimousse, ses cheveux en bataille et.. ses valises ? pourquoi ? merde, il l'a plantée. tu avais vu juste, alors tu t'avances, le coeur serré. ce qui lui arrive, ça t'arrive aussi. c'est instinctif. vous êtes les plus vieux du clan spurs, les premiers à être partis de la maison également. alors forcément.. quand elle te voit, elle sourit à moitié et tu te jettes déjà à son cou. daisyyyyy. tu lui dis en serrant fort. je suis là. tu penses sans oser prononcer ces mots. ton coeur qui se cale sur le rythme du sien. tu ne lui poses aucune questions, tu te contentes de respirer son parfum qui t'avait manqué.. celui des fleurs, celui du sang, de la famille.

t'avais rien dit à micky, à la base. pas tout de suite. t'avais préféré garder les choses pour toi et tu avais atterri chez ta mère, en premier lieu. t'aurais mieux fait d'appeler tout de suite ton frère. mais t'avais peur en quelques sortes de sa réaction. peur de ce qu'il pourrait penser alors que tu as quitté la ville pour un homme qui au final t'as laissée tomber comme une vieille chaussette. mais ça allait pas chez ta mère et il était temps de changer ça. elle a un mec. un connard pour changer. elle n'a jamais pu tomber sur un mec bien, de toute façon. il n'y avait pas de raison que ça change aujourd'hui. tu ne le supportais pas. mais vraiment pas du tout. impossible de vivre avec lui, t'as fait tes valises, encore une fois. et te voilà devant cette immeuble. immense. à t'en donner la nausée, presque. tu lèves les yeux, tu soupires et tu te décides à annoncer à ton frère que tu es devant chez lui et que tu l'attends. tu sers entre tes mains la poignée de tes valises alors que ton frère te confirme qu'il arrive. tu attends. un peu stressée, tu dois bien le reconnaître. t'as besoin que ton frère te laisse dormir chez lui. absolument. et puis finalement un bus qui s'arrête et ton regard qui rencontre celui de ton frère. après tout ce temps. ça te fait sourire, un petit peu. daisyyyyy. que tu l'entends te crier dans les oreilles alors qu'il vient de te sauter au cou. et bien malgré toi, tu ris. parce que finalement, ça te fait plaisir de retrouver ton frère. t'es content de me voir apparemment. tu lances finalement en plantant ton regard dans le sien. tu m'as manqué, micky. tu te risques quand même à dire, un peu mal à l'aise. ça te ressemble pas trop d'avouer ce genre de sentiments à ton frère.

la pudeur fait partie de votre famille depuis toujours. vous ne vous dites rien de trop intimes, vous n'y avez jamais été habitués. ta mère n'est pas comme les autres maman. elle n'a jamais prié pour vous, elle n'a jamais fait le signe de croix sur ton front avant de t'endormir et n'a jamais préparé tes petits-déjeuners pour l'école. elle a toujours été absente, tantôt junkie, tantôt juste dépressive. à naviguer entre des extrêmes insupportables qui, au final, t'avait poussé à suivre l'exemple de daisy. quitte la famille, quitter le cocon et t'installer tout seul. bosser dans un petit cinéma entre deux cours d'histoire de l'art et gagner un peu d'argent pour payer ta part de loyer. bebe et les autres sont gentils, même s'ils ne savent de toi que ce que tu veux bien leur montrer. tu restes pourtant persuadé qu'ils ne te jetteraient pas à la porte si tu prenais le temps de tout leur dire. trop pudique, encore une fois. alors te jeter au cou de ta soeur, ça ne te ressemble pas. elle est la première surprise quand vous vous détachez l'un de l'autre. t'es content de me voir apparemment. tu hoches la tête sans oser le dire, mais c'est vrai. trop content. tu as eu l'impression d'étouffer sans elle. tu ne l'expliques pas, vous n'êtes pourtant pas jumeaux. mais c'est tout comme. tu m'as manqué, micky. tu la regardes, un peu choqué. tu n'as pas l'habitude non plus, alors tes yeux glissent de la valise à son regard. tu.. tu t'en vas, encore ? si ça se trouve, il ne l'a pas plantée. elle vient juste t'annoncer qu'elle quitte le pays. ton ventre se tord, ton estomac se noue. tu n'envisages pas de la voir partir plus loin que san fransisco, pas encore une fois. alors brusquement, tu te sens mal à l'aise, presque tremblant.

ça a toujours été étrange cette relation que tu pouvais entretenir avec ton frère, micky. tu ne savais pas vraiment comment expliquer ce qu'il se passait entre vous, à dire vrai. mais pour toi, il a de l'importance. beaucoup trop d'importance. et pourtant, tu n'arrives pas à le dire. alors c'est étrange pour toi aujourd'hui de le voir te sauter dans les bras. comme c'est étrange de t'entendre lui dire qu'il t'as manqué. parce que t'as pas eu l'habitude de lui dire ça. jamais. et pourtant, aujourd'hui il fallait sans doute que tu le dises. il fallait que tu lui avoues que tu avais besoin de lui dans ta vie. t'as ce petit sourire en coin qui ne te lâche plus alors que tes yeux sont posés sur les siens. même si tu traverses une mauvaise passe, ça te fait chaud au coeur de pouvoir à nouveau le voir. le toucher, lui parler, tout simplement. tu.. tu t'en vas, encore ? qu'il te lance en regardant tes valises. sans doute pas prêt à te voir partir une fois de plus. alors que vous venez tout juste de vous retrouver, pour de vrai. tu secoues la tête, rapidement. oh que non. je reste. tu lances, bien décidée. avant de vite poursuivre, comprenant bien que ton frère ne doit rien comprendre à ce qu'il se passe. c'est fini. avec mon mec. il m'a laissée. alors me voilà. tu parles vite. tu parles pas beaucoup aussi. mais tu as dis l'essentiel, de toute façon.

elle peut repartir, après tout. elle ne t'appartient pas, non ? pourtant, on est une famille mais parfois, ça n'explique pas tout. toi-même, tu as quitté les tiens pour ton indépendance. tu n'es pas bien loin, c'est vrai, mais tu respires déjà un peu mieux depuis que ton beau-père n'est plus dans les parages. quant à tes frères et soeurs, tu fais le maximum pour les voir le plus souvent possible. ils te manquent, comme daisy t'a manqué. vous ne vous le dites jamais mais vous le pensez si fort. tu lui souris, malgré tout. parce que tu ne veux que son bonheur. et si c'est lui son bonheur après tout, tu n'es personne pour l'en empêcher. mais son regard se fait oblique et droit, comme elle a toujours eu l'habitude de le faire. elle secoue le visage avec vigueur. oh que non. je reste. et c'est ton coeur qui hurle de joie, qui se gonfle d'amour à nouveau. tu voudrais sautiller sur place mais la suite t'en empêche. c'est fini. avec mon mec. il m'a laissée. alors me voilà elle doit sans doute être triste, non ? j'm'en fiche, je l'aimais pas de toute manière. mais elle, oui ! tu te retiens, tu souris un peu et tu lui demandes et.. et tu vas bien ? parce que c'est ce qui t'importe le plus. qu'elle se sente bien, qu'elle aille bien. je suis là, maintenant. tu voudrais ajouter, mais par pudeur, tu ne fais que le penser.

tu réalises que t'as beaucoup de choses à dire à ton frère avant de lui demander s'il veut bien de toi dans son appartement. parce que t'as plus d'endroit où vivre. si ce n'est chez votre mère, mais c'est hors de question. tu ne sais même pas si micky sait qu'elle a un nouveau mec. sans doute qu'il doit le savoir. et s'il le sait, alors ça te paraît évident qu'il le trouvera tout autant insupportable. tu sais qu'il sera forcément de ton côté pour ça. mais une chose après l'autre. tu ne peux pas tout déballer d'un coup, comme ça. t'as toujours ta main accrochée à la poignée de ta valise. tu la sers de temps en temps. t'aimerais pouvoir la poser à quelque part et ne plus jamais la reprendre. cette valise qui semble t'être totalement indispensable ces derniers temps. que tu ne cesses de trimbaler avec toi depuis que tu es partie de chicago. ville où tu as vécu quelques temps, en compagnie de cet homme que tu croyais être le bon. légèrement naïve. t'as voulu y croire et tu t'en es prise plein la figure. ça t'apprendra. et.. et tu vas bien ? qu'il te demande après que tu te sois décidée à lui avouer ce qu'il se passe. ou en tout cas, le début de l'histoire, peut-être. tu ne sais plus où tu en es. tu ne sais même plus ce que ton frère sait ou non. tu le regardes et tu te forces à sourire. ça va aller, disons. tu hausses les épaules. tu savais que maman avait un nouveau mec ? tu demandes ensuite pour changer de sujets. t'as pas envie de t'étaler sur ton histoire avec ton mec. pas pour le moment. alors tu parles de votre mère. parce que finalement c'est ce qui te permettra ensuite de poser la question que tu dois lui poser.

elle est de retour. pour de bon, c'est ce qu'elle a dit. son mec l'a plantée, connard. mais tu es content, finalement. parce que sinon, elle serait encore là-bas, à chicago. elle serait loin de toi et tu te sentirais vide, encore et toujours. maintenant qu'elle est de retour, tu vas pouvoir la voir plus souvent, tu vas pouvoir lui parler de jorg, de la colocation et de tout ce que tu traverses. parce que ta vie n'a plus rien à voir avec celle que tu avais avant qu'elle ne quitte san francisco. vous vous étiez appelés, juste un peu. tu la tenais au courant des dernières nouvelles et elle te parlait de cette ville qui te paraissait si loin. tu as gardé les cartes postales qu'elle a bien voulu t'envoyer, elles sont sur les murs de ta piaule. tu avais l'impression qu'elle était un peu là, même si ce n'était pas le cas. mais maintenant, elle est là, non ? alors tu respires, un peu mieux, un peu plus. tu vois bien qu'elle tripote la poignée de sa valise, et une question te pique les lèvres. est-ce qu'elle vient tout juste de rentrer ? ça va aller, disons. elle dit dans une pudeur toute retrouvée. c'est fini les élans d'affection et les confessions, désormais, c'est à nouveau les sous-entendus et les non-dits qui prennent le pas sur le reste. tu savais que maman avait un nouveau mec ? tu hoches la tête, elle vient de t'apporter la réponse à tes interrogations. elle est donc passée à la maison, d'abord. oui, c'est le père du dernier. tu lui dis en souriant à moitié. c'est un gros naze. il a quitté maman juste après la naissance de bambi et puis, il est revenu six mois plus tard. tu expliques en soupirant. quel gros con ! tu ne lésines pas sur les mots, tu n'as pas peur de dire ce que tu penses de lui. de toute manière, tu es persuadé qu'elle n'en pense pas moins.. sinon, c'est là-bas qu'elle aurait posé ses valises, n'est-ce pas ?

tu ne quittes pas ton frère des yeux. t'as encore de la peine à croire qu'il se trouve bien là, devant toi. et pourtant, c'est bien le cas. t'as retrouvé ton frère après tout ce temps où vous étiez bien trop loin l'un de l'autre. et à présent que tu discutes avec lui tu te demandes pourquoi tu n'es pas revenue directement jusqu'à lui. tu aurais mieux fait, en tout cas. rencontrer le copain de ta mère ne t'avais pas franchement plu. c'est d'ailleurs le sujet que tu décides d'aborder ensuite. le ton de ta voix laisse entendre que tu n'es pas des plus ravies que ta mère fréquente ce mec. elle n'était vraiment pas capable de se trouver quelqu'un de convenable et ça commençait vraiment à te fatiguer. oui, c'est le père du dernier. forcément, t'aurais dû le savoir. mais t'as de la peine à suivre avec ta mère. tu ne sais pas qui est le père de qui. t'as arrêté de suivre depuis un moment. déjà que tu ne sais pas qui est le tiens. alors tu ne vas certainement pas chercher à savoir qui est celui des autres. c'est un gros naze. il a quitté maman juste après la naissance de bambi et puis, il est revenu six mois plus tard. quel gros con ! tu devrais soupirer, aussi. mais tu souris. parce que ça t'amuse de voir comme vous pouvez penser pareil micky et toi. à croire qu'elle ne pourra jamais se trouver un mec bien. j'envisage de plus en plus de lui faire des cours sur les moyens de contraception. tu ajoutes en riant légèrement. bien que tu sois totalement sérieuse, dans le fond. j'ai dormi chez eux quelques jours. j'ai pas supporté.. et me voilà. tu ajoutes finalement. pour que ton frère comprenne un peu mieux la situation.

elle a l'air en forme pourtant. tu sais que c'est pas simple de passer par votre demeure, de revoir votre mère et surtout de supporter cet imbécile qu'elle fréquente depuis la naissance de bambi. tu aurais voulu que ça se passe bien pour pouvoir rester auprès des tiens. malheureusement, la vie en avait pensé autrement. quand tu l'avais entendu te hurler dessus pour rien et quand tu l'avais entendu hurler sur tes frangins.. tu avais vrillé. tu avais parlé avec ta mère mais elle était bien décidée à le choisir lui plutôt que vous. alors, toi, tu avais quitté le domicile familial. sans emporter tes frères et soeurs mais en te jurant de ne pas les abandonner pour autant. tu retournes les voir de temps en temps, le plus souvent, tu les attends à la fin des cours. tu passes un peu de temps avec eux et tu te sens moins coupable. tu es le plus grand des frères, juste après daisy. tu as cette responsabilité sans pour autant vraiment l'accepter. alors maintenant qu'elle est de retour, tu te sens un peu soulagée. le poids de cette tâche va reposer sur ses épaules, non ? elle m'a manqué. c'est tout ce à quoi tu penses à la voir et l'entendre. quand elle te parle de la maison, tu ne mens pas, tu ne caches rien. elle sourit, faisant écho à tes propos rapidement. à croire qu'elle ne pourra jamais se trouver un mec bien. j'envisage de plus en plus de lui faire des cours sur les moyens de contraception. tu rigoles un peu. c'est vrai, on devrait. tu penses alors que tu te sens un peu coupable de considérer tes frères et soeurs comme des erreurs de parcours. tu les aimes tendrement, mais être dix dans la même maison et ne rien avoir de plus qu'une mère qui ne sait pas choisir les hommes dont elle tombe amoureuse, c'est sans doute pénible.. plus que pour les autres familles. j'ai dormi chez eux quelques jours. j'ai pas supporté.. et me voilà. tu regardes la valise, tu comprends ce qu'elle veut dire et tu trouves l'idée plutôt séduisante. si.. si tu veux, tu peux dormir dans mon lit. tu lui proposes naturellement. c'est un peu petit mais si ça peut te dépanner. voilà.. mais.. et les autres ? tu ne leur diras rien. je devrai le dire à bebe. mais tu n'en feras rien, tu le sais déjà.