unsteady (feat mareck)

le poids devient trop lourd, la vie n’a plus de goût pour toi. tu as essayé, tu y as cru mais t’as perdu la partie, t’as échoué. tu ne supportes plus les battements de ton cœur, chaque respiration est douloureuse. tu fermes les yeux, tu veux juste t’endormir, oublier, ne plus te réveiller, te laisser aller dans les limbes, laisser les ténèbres t’envelopper de leur bras si rassurant, tu veux juste revoir leur visage, juste une fois. tu veux les retrouver, être avec eux. pas ici, pas dans ce monde trop cruel, trop dur, sans moral ni sens. tu sens ton rythme cardiaque ralentir, tu souris presque, tu veux partir, t’envoler loin de tout ça. mais tu entraperçois une lueur rapide et une voix sourde qui te semble si loin, trop loin, trop tard, tu glisses déjà ailleurs.
réveil soudain, réveil brutal. la douleur, la lumière trop forte sur tes yeux encore clos. tu peines à respirer, tu ne devrais pas respirer, tu ne devrais pas avoir mal, tout devrait être beau et paisible mais ce n’est pas le cas. tu sens la vie revenir en toi, une force inconnue coule dans tes veines. tu entends des bruits autour de toi. tu es en vie, tu ne sais pas comment mais tu as survécu. alors la réalité te frappe de plein fouet et tu laisses tes propres larmes couler.
Tu ouvres les yeux. Le soleil lèche ton visage de ses rayons chauds. Ton cauchemar encore trop frais dans ton esprit, cauchemar qui n’est que le reflet de ta réalité, de ton passé. Passé trop proche, deux jours à peine. Une tentative vaine, un appel à l’aide. Un acte désespéré que tu regrettes déjà et pourtant vivre ça fait toujours aussi mal. Tu as promis, t’as pas eu le choix. T’as accepté de prendre ce rendez-vous chez ce psychologue pour parler. Chose que tu hais le plus au monde, mais c’était ça ou un séjour en hôpital psychiatrique, autant t’achever tout de suite. Tu parcours le long couloir qui te mène à la salle d’attente commune à tout le cabinet. Tu t’y installes après t’être enregistré auprès de la secrétaire. T’as déjà envie de repartir.

craquage. les médias l'accablent, les béquilles l'encombrent, et il continue à se torturer l'esprit en suivant l'actualité de son équipe. elle n'est pas ici sa place, dans cet appartement partagé. elle est de l'autre côté de l'écran, les crampons taillant l'herbe sèche de la russie. alors il râle mareck. il râle même s'il sait qu'il ne devrait pas se plaindre. il connaît les malheurs du monde, la famine, la guerre, la solitude. alors il râle, sans véritablement se plaindre - parce qu'il y a bien pire que lui. trois mois qu'il se trimbale ses béquilles et il n'est toujours pas capable de s'extirper du canapé sans manquer de trébucher. un juron craché à qui veut bien l'entendre, puis le départ pour sa grand escapade quotidienne - sa séance de kinésithérapie.
passage obligatoire au secrétariat, mareck ne se présente plus. devenu un habitué des lieux, une salutation suivie d'un sourire suffise à le laisser entrer dans la salle d'attente. ses lèvres se tirent en un sourire sincère lorsqu'une silhouette familière se dessine au fur et à mesure de son avancée. wyatt, assis sur une chaise, calme, et très vite rejoins par mareck qui s'installe à ses côtés. « wyatt, ça fait plaisir de te voir ! t'étais passé où ? » plusieurs jours d'absence, silence radio. pas de signe de lui sur le radar et l'inquiétude qui monte en mareck. c'est qu'en peu de temps il a apprit à connaître ses démons, à apprivoiser l'animal, se montrer présent. alors ça lui réchauffe le coeur à mareck de le voir dans cette salle, ça le rassure dans un certain sens parce qu'il se dit que tout va bien. alors que non, tout ne va pas bien.

T’as pas envie d’être là. Mais tout ce que tu as fais jusqu’à présent, t’as mené jusqu’ici. c’était le passage obligatoire pour toi. Tu te demandes même comment tu as fait pour ne pas atterrir ici plut tôt. Tu jettes un coup d’œil à ta montre. Trop tôt, trop tard, t’en sais rien, mais il n’y pas grand monde dans la salle, à part toi et un type bizarre assis en face qui semble absorbé par le magazine qu’il lit. tu t’adosses contre le mur, fermant les yeux quelques secondes à peine. Instant très vite perturbé par une voix familière.  wyatt, ça fait plaisir de te voir ! t'étais passé où ? tu te redresses aussi vite, rouvrant les yeux, un faible sourire aux lèvres, peut-être trop faux pour être convaincant. salut mareck ! content de te voir aussi. ce qui est vrai en soi, tu es ravi de le voir, t’aimes bien mareck, t’as l’impression que tu peux vraiment lui parler, qu’il peut te comprendre en un sens. Mais t’as pas tellement envie de lui dire la vérité, là tout de suite. Tu te sens encore trop honteux de ton geste, trop stupide pour l’avoir envisagé ou bien d’avoir raté ton coup, t’en sais trop rien, encore. Tu tentes de prendre un air décontracté. je sais je suis désolé, je n’ai pas trop eu le temps de passer ces derniers jours, j’ai.. mais tu n’as pas envie non plus de lui mentir, alors tu restes vague. Tu ne saurais pas quoi dire de toute façon. comment lui avouer que tu as tenté de mettre fin à tes jours, juste comme ça, parce que ça ne va pas aussi bien que tu le prétends généralement, mais que t’es pas capable toi-même de dire ce qui cloche, ce que ne va pas. De mettre un doigt sur le réel problème, parce qu’il y en a trop. Tu reprends doucement en détournant le regard. j’étais pas mal occupé à vrai dire. tu plantes ton regard sur la table basse posée au milieu de la salle, recouverte de vieux magazines tous datés d’au moins plusieurs mois.